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Journal Extime de Max Memmi - Page 12

  • Les réactions des médias après la mort de mon frère Albert Memmi

    Depuis quatre jours , un vrai déferlement de messages. D'abord ceux qui me sont adressés personnellement, par téléphone, sms, mails, sur mon site Facebook, sur Messenger, venant de personnes que je connais mais aussi de gens dont j'ignorais l'existence, de France et du reste du monde auxquels j'ai été naturellement très sensible, ensuite les hommages des médias qui me sont signalés par mes proches, parents et amis: Le Monde, Le Point, La Croix, Paris-Match, Ouest-France, Tribune juive, Nice matin, Var matin, Le Populaire du Centre, Business News, La règle du jeu, RTS.CN, une très belle revue de presse de Claude Askolovitch sur France-Inter le 25,  mais aussi un hommage très long et très élogieux de l'Ambassadeur de France à Tunis, Olivier Poivre d'Arvor, publié sur son site Facebook qui a déclenché près de 700 commentaires, rappelant la stature de l'homme qui a disparu et son œuvre. Le romancier( certains ne signalent que La Statue de Sel qui est son premier roman paru en 1953,- mon frère avait alors 33 ans- qui avait été préfacé par Albert Camus, qui les avait le plus marqués) et le sociologue avec ses ouvrages qui ont fait autorité dans le monde entier et réédités mainte fois, sur la colonisation ( le premier préfacé par Jean-Paul Sarte), la dépendance, la pourvoyance.

    J'ai pu retrouver plusieurs de ces réactions en cliquant simplement sur Google:  Décès Albert Memmi ou simplement : Albert Memmi.
    Certains articles comportent des erreurs, que je relève et signale à leurs auteurs, des confusions entre les héros de ses romans et la vie réelle de mon frère, surtout lorsqu'il s'agit de ma propre famille, ainsi nous n'avons jamais changé de nom, Memmi est notre nom depuis des siècles( la confusion vient d'une réflexion de J.P Sartre dans sa préface, que j'ai commenté moi-même dans mon livre: "Être ou ne pas être juif? Pourquoi? Telle est la question," préfacé par le philosophe Pascal Bruckner. Ainsi encore, le prénom de ma mère, comme l'attestent la aussi les actes d'Etat-civils, est bien Marguerite et non Méïra, qui est le petit nom donné par mon père et qui, il est vrai a été repris par tous. Mon père l'appelait aussi Margot. En revanche, mon père s'appelait bien Fradji et non pas François comme je l'ai lu dans certains articles

     

     

     

  • La mort du frère ainé

    Mon frère ainé Albert est mort au petit matin du vendredi 22 mai, peut-être dans le nuit du 21 ou 22: je ne sais pas trop. C'est par un appel de mon frère Georges vendredi à 15h que j'ai appris la douloureuse nouvelle. Lui-même a été alerté par Shéhérazade, une des auxiliaires de vie de mon frère Albert, quand elle a découvert le corps sans vie, affolée, elle a appelé le premier numéro qu'elle a trouvé.
    Cet appel, je l'attendais depuis longtemps, je savais qu'à son âge, il pouvait nous quitter à tout moment, et pourtant je redoutais cet appel. A partir du moment où mon frère Albert franchissait allégrement les années, 95, 96, 97, 98 et 99 ans, il devenait comme la dernière clé de voûte de notre fratrie, cette belle et étrange fratrie de huit enfants, lui l'ainé des quatre garçons et moi le  benjamin de la famille. Il abordait le rivage des centenaires, et il m'arrivait de rêver qu'il pourrait, après tout vivre encore quelques belles années. Même si les échanges téléphoniques devenaient de plus en plus difficile, compte tenu de sa perte d'audition, quand je lui rendais visite chez lui, dans cet appartement du 5 de la rue saint Merri, qu'il occupait en tant que locataire depuis plus de soixante ans, je trouvais beaucoup de plaisir à nos longues conversations et je pouvais constater qu'il conservait encore, dans l'année de son centenaire, toute sa lucidité et toute son intelligence.
    Mon frère nous a quitté. J'ai beaucoup de chagrin, mais je suis surtout désemparé, ne comprenant pas encore que je ne le reverrais plus.
     

  • Une piste pour comprendre Patrick Modiano.

    Voilà je crois une clé ( mais il y en surement bien d'autres) pour comprendre l’œuvre de Modiano: elle figure dans cette phrase : " Moi, je ne plaisantais pas. Si je m'étais engagé dans ce travail, c'est que je refusais que les gens et les choses disparaissent sans laisser de trace. Mais pouvons-nous jamais nous y résoudre? " ( extrait de son roman Chien de printemps, au tout début du livre.)
    Voilà un écrivain que j'ai longtemps boudé et qui aujourd'hui commence à me fasciner, avec lequel je me découvre une certaine parenté. Ces maniaqueries, ces incessantes introspections, ce besoin obsessionnel, viscéral de découvrir la vie d'autrui, n'est-ce pas ce que j'ai toujours vécu et essayer ensuite de traduire dans mes romans?  

  • Nous avons cassé le virus?

    Tout en répétant qu'il ne fallait pas faire le malin face à cette épidémie et bien continuer de se protéger par des gestes barrières et en plus éventuellement par le port d'un masque, le premier ministre a ajouté  dans sa conférence de presse que nous avons cassé le virus.  Je ne sais pas si nous avons réussi à briser ce virus, mais ce qui est sûr c'est que depuis 20 jours, le fameux pic de début avril s'est totalement inversé, puisque le nombre de personnes hospitalisées et le nombre de réanimation n'a fait que diminuer, et notamment de façon importante ces trois derniers jours,  presque nous avons enregistré 800 hospitalisations en moins chaque jour et près de 300 réanimations en moins chaque jour également  ramenant le nombre de malades en réanimation sous la barre des 3000, et on sait que c'est dans ce domaine des réa que le combat se joue réellement. Il ne nous reste plus qu'à espérer voir cette courbe descendante se poursuive tous les jours à venir et ainsi permettre au personnel soignant de souffler enfin un peu et nous de ne pas regretter ces décisions de déconfinement.

  • Retour à Modiano

    Je viens de terminer la lecture d'un nouveau roman de Patrick Modiano: " Remise de peine". L'auteur a 33 ans, il se souvient de ce petit garçon qu'il était à l'âge de 10/11 ans. Il avait été placé, avec son jeune frère Rudy, chez des amis de sa mère dans un village aux environs de Paris ( en fait, il s'agit de Jouy-en-Josas, la maison qui porte le nom de Guillotin, parce que ce dernier est enterré dans le parc entourant la maison. Cette demeure bourgeoise à la façade recouverte de lierre est située au 38 rue du Docteur Kurzenne, dont il reproduit deux photos dans ce petit album de famille qu'il nous offre avant le texte des 10 romans( regroupés dans un gros ouvrage de la collection Quarto publié par Gallimard en 2014) comme pour reconnaitre enfin que toute son œuvre n'est qu'une suite d'étapes de sa biographie.
    Cette maison où il passera plusieurs mois est habitée par trois femmes:
    Hélène Toch dite la petite Hélène, très petite femme d'une quarantaine d'années, Annie 26 ans , qui conduit uen quatre-chevaus, et Mathilde F sa mère, la cinquantaine. Placés là, Patrick Modiano - que tout le monde appelait alors Patoche- et son frère Rudy, sont quasiment abandonnés par leurs parents( cette absence des parents revient dans plusieurs de ses "romans". ) puisqu'ils ne donnent presque aucune nouvelle. La mère comédienne en tournée théâtrale envoie une carte postale de Tunis. Le père au métier indéterminé, aux activités troubles des cartes de Brazzaville et de Bangui, puis plus rien, mais aussi tout de même quelques visites, certains jeudis.
    Les trois femmes reçoivent beaucoup, quelques hommes et aussi des femmes plus présente que les hommes:  Frede, une femme de 35 ans, Blanche-neige, une jeune fille chargée de s'occuper des garçons, on dirait aujourd'hui une baby-sitter, Andrée K. Des personnages haut en couleurs, comme dans tous les romans de Modiano, que ce dernier décrit comme des gens mystérieux mais dignes d'intérêt, tels que Eliot Solter marquis de Caussade, Roger Vincent qui souriait tout le temps et qui venait les voir au volant de sa belle voiture clinquante américaine,
    Jean D qui avait la même taille et les mêmes gestes que le Père Noël et surtout la même montre qui indiquait les secondes, les minutes, les heures, les jours, les mois et les années et qui donne à Patoche son premier roman policier: " Touche pas au grisby."
    Le seul roman de Modiano ( parmi la dizaine que j'ai lu à ce jour) que j'ai totalement aimé, sans aucune réserve, parce que j'ai trouvé ce récit attachant, plein de chaleur et de tendresse et le style très épuré( mais c'est une constante dans les romans de Modiano), une écriture limpide, surprenant pour exprimer des souvenirs souvent confus avec de nombreuses redites et répétitions.