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Culture

  • Mon tout nouveau livre

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    Je vous présente mon 12e roman et mon 17e livre, "Un pas de côté", mais celui-là est véritablement jubilatoire, une histoire d'amour passionnante, pleine d'émotion mais où l'humour, les commentaires sur l'art, la littérature, et la vie tout court,ne manquent pas non plus.
    Écrit à deux mains avec une co-auteure inattendue, Brigitte Dupuigrenet Desroussilles, qui possède un Doctorat en littérature comparée, et des talents littéraires exceptionnels, une sensibilité bouleversante.
    Je suis très fier du résultat de notre travail.
    Un livre à lire sans tarder.
    Comme pour tous mes livres précédents, vous pouvez commander ce dernier à votre libraire habituel ou même à un point presse, ou à la Fnac où il serait déjà disponible, ou à notre éditeur parisien Les Éditions Orizons, 25 rue des Écoles Paris 5e ou son diffuseur Les Éditions l'Harmattan, 5 rue de l’École Polytechnique Paris 5e .
    Je peux également vous l'adresser avec une dédicace.
    max-memmi(at)wanadoo.fr   
     
     
  • Terre natale, religion, identité, nation et peuple.

    Terre natale, religion, identité, nation et peuple.

    Voilà les thèmes de mon prochain essai ( auquel je m’attellerai dès que j’aurais bouclé le livre volumineux sur « Albert Memmi et le reste de la tribu » qui est en voie d’achèvement, au stade de la relecture)  et, en attendant, paradoxalement, alors que je devrais, au contraire , me rapprocher d’eux, pour mieux les comprendre, depuis quelques semaines, j’ai décidé de prendre sérieusement mes distances avec tous ces gens, proches ou non, qui parlent trop de leur religion, leur judéité, chrétienté, islamité (je cite dans l’ordre de leurs apparitions dans la vie de l’Homme), non seulement je ne me sens pas concerné, parce que je refuse toute appartenance à une quelconque religion, mais j’ai du mal à comprendre leur attachement, souvent viscéral, à leur religion, j’essaye de trouver des explications : peur du vide ? Ne pas pouvoir se raccrocher à une croyance qui les rassure et les apaise, les unir à un rituel solide qui accompagnerait leur existence ? Besoin impérieux de croire à un homme providentiel (prophète détenant une mission de Dieu lui-même, Abraham et Mahomet ou Jésus considéré comme le vrai fils de Dieu ?) assimilé à un dieu tout puissant ? Se rassurer en sachant qu’on fait partie d’une communauté solidaire ? Oui, mais seulement solidaire à l’intérieur de chaque communauté. Chaque adepte de sa religion étant persuadé que sa religion est la meilleure, que celle d’autrui qui serait, elle dans l’erreur, sinon dans l’impie.  On est loin de l’étymologie du mot religo, religâre, qui signifie lien, relier, puisque, hélas, l’Histoire est là pour nous le rappeler, que les religions ont toujours divisé les hommes jusqu’à les pousser à s’entretuer entre eux, au nom de leur foi.

    J’ai décidé aussi, dans le même temps, de prendre mes distances vis-à-vis de tous ceux qui ne parlent que de leur terre natale, qui expriment leur nostalgie, voire leur mélancolie de cette perte qu’ils qualifient de douloureuse, certains vont jusqu’à parler de catastrophe, jusqu’à l’obsession. Je ne comprends pas leur tourment, alors que je sais de quoi ils parlent, puisque j’ai, moi-même, quitté le pays où je suis né (ils disent terre natale, mais si la terre natale pour certains se situe dans le même pays , ou dans la même ville où ils vivent, et qu’il sont heureux, alors oui , qu’ils soient attachés à cette terre natale, pourquoi pas !) mais comme eux, cela remonte à plusieurs décennies.  Je trouve alors que cette culture permanente de la perte, enracinée comme une plante toxique, au plus profond de leur être, est nocive et totalement improductive. Elle ne permet pas d’avancer. Anxiogène aussi. Je dis cela parce que je ne me sens pas concerné, Je suis un citoyen d’une nation érigée en république et profondément démocratique, qui m’accorde les mêmes droits et privilèges accordés aux autres citoyens, et j’aime cette nation, je n’en ai pas et n’en ai jamais eu d’autre. Car, c’est peut-être dur à entendre pour certains, mais pour parler-vrai,  en Tunisie, mon pays natal donc, bien obligé de l’admettre, j’avais l’impression de vivre en sursis, en suspens de quelque chose, d’un événement majeur que j’attendais fébrilement, et quand le gouvernement, très légitimement,  a décidé d’introduire l’arabe dans tous les rouages de la vie, de remplacer le français- qui leur avait été imposé pendant la colonisation-  par l’arabe, leur langue maternelle,  dans tous les imprimés et formulaires de l’Administration, moi, alors rédacteur principal à la très officielle Agence Comptable centrale du Gouvernement tunisien, du jour au lendemain, je devenais analphabète dans ce qui était, théoriquement,- mais légitimement ? -  mon pays. De plus, je comprenais bien que je devenais un étranger indésirable, alors même que j’étais, en ces temps-là, encore tunisien, comme la grande majorité de la population, mais pas musulman comme eux. Pour être un citoyen à part entière, il fallait être tunisien ET musulman. Un temps, je me suis même senti en danger, physiquement et psychologiquement. Je commençais à douter de mon identité. D’où mon aversion des religions, de toutes les religions, surtout lorsqu’elles se mêlent de régenter la vie publique forte de sa qualité de religion d’État, ce qui devenait le cas de la Tunisie, puisque les nouveaux maîtres l’avaient inscrite dans leur toute nouvelle constitution.   

    L’événement que j’attendais s’éclairait enfin, je devais aller vivre au sein d’une nation, où, premièrement, chaque citoyen a les mêmes droits, quelle que soit sa religion ou même s’il refuse d’en endosser une, ou qu’il ait aussi le droit d’afficher son athéisme, et secondement, dont la langue correspondait avec la seule que je connaissais : le Français. Mes dicos me précisaient qu’il existait 29 pays francophones dans le monde, c’est-à-dire où le Français est reconnu comme langue officielle. 

    Je pouvais m’installer en Belgique ou au Luxembourg, tout proche de cette France qui me fascinait pour son patrimoine culturel, mais où on disait que la vie y était compliquée, logement, et emploi difficile à acquérir, ou m’exiler au Québec, dont j’aimais l’architecture, mais pas le climat, ou alors dans un des départements français d’outre-mer, où la température est plus clémente, proche de celle à laquelle mon corps  était déjà  habitué, pendant mes vingt premières années, comme La Martinique ou 13000 kms plus loin, à l’île de la Réunion.

    J’ai choisi la France métropolitaine. La France n’est donc pas mon pays par nature, mais par destination, comme disent les juristes, un choix du cœur et aussi, surtout de l’esprit. J’ai intégré dans mes gènes sa culture et son sens de la liberté. Je ne parlerai pas des deux autres composantes de sa devise qui sont l’égalité et la fraternité (devise qui figure à l’article 2 de notre Constitution,) car, cela mériterait de longs développements, ces deux droits me paraissant loin d’être appliqués.

    J’ai donc choisi la France, mais je n’ai pas choisi d’être juif. Je ne suis juif ni par nature, ni par destination, mais par obligation, c’est-à-dire, que je le veuille ou non, je suis juif et le resterai jusqu’à ma mort. Pour tenter de comprendre cette religion, dont j’ignorais à peu près tout, et tenter surtout de déterminer la part de judéité qu’il peut y avoir en moi, j’ai écrit, en 2017, tout un livre sur ce sujet « Être ou ne pas être juif ? Telle est la question. Pourquoi ? » qui a bénéficié d’une préface élogieuse de Pascal Bruckner, philosophe et écrivain traduit dans plus de trente pays. Je n’y reviendrais donc pas ici.  

    Je veux simplement affirmer que cette France, où je vis à présent depuis presque 70 ans, sur le terreau que j’ai façonné, m’a accueillie et m’a tout apporté et aussi, ce n’est pas rien, m’a réconcilié avec moi-même, en gommant les contradictions qui me taraudaient.

     C’est sur cette terre que sont nés mes enfants, les enfants de mes enfants, et les enfants des enfants de mes enfants. Tous sont solides, et pour celles et ceux en âge de travailler, occupent des fonctions gratifiantes, le sentiment, un peu prétentieux, d’avoir ainsi remboursé une partie de ma dette à la France, sans compter l’ouvrage « La France en partage » que j’ai publié en 2015.  Enfin, c’est sur cette terre de France que sont enterrés mon père , ma mère et toute ma fratrie.

    Et, contrairement à mes deux autres frères, Albert et Georges, où la Tunisie est omniprésente dans tous leurs livres, la Tunisie n’apparaît dans aucun des miens, qu’il s’agisse de mes romans ou de mes essais. Je ne suis pas un nostalgique du passé.  

    C’est pourquoi, je ne comprends plus les autres, je veux parler de ceux qui vivent en France, mais qui ont leur esprit ailleurs, je les vois enfermés dans une prison virtuelle infernale, les yeux tournés vers des horizons inatteignables, écartelés entre plusieurs cultures, qui les obligent quelquefois à traduire leur état d’âme dans des livres que je trouve tantôt tristes, tantôt naïfs, en tout cas navrants, car leurs auteurs semblent n’être bien nulle part, sujet qui, du reste, prolifère depuis quelque temps.

    Je veux, quant à moi, vivre dans l’universalité, être un citoyen, frère en humanité avec tous mes congénères.

    En conclusion - une conclusion très provisoire, puisque mes propos d’aujourd’hui ne représentent que l’esquisse de ce que sera mon prochain livre, naturellement plus ambitieux - ces gens – parlant de religion et/ou nostalgique de ce qu’ils appellent leur terre natale perdue- m’indisposent ; j’ai donc décidé, ai-je dit, non pas de les fuir, ce serait excessif, mais de m’en éloigner, parce que j’ai peur de leur enfermement, de leur certitude en leurs croyances qu’ils appellent leurs valeurs, voire même leur richesse.

    Tant pis, si, à côté d’eux, je peux paraître très pauvre. C’est le prix de ma liberté. Je suis libre de ne pas être attaché à un « ailleurs » utopique. Leur écartèlement me donne le vertige.

    Si je mets de côté leur ironie, leurs railleries ou leur agressivité en réaction à mes propos, ou encore leur mépris, dans le meilleur des cas certains préféreront le débat - et je m’en réjouis, je suis terrifié par toute forme de violence-, ils m’opposeront la notion de peuple. L’appartenance à un peuple respectant la même religion, auquel il convient de rester fidèle. Par respect pour les ancêtres.

    Or, précisément, je ne crois pas à l’existence de peuples. Je pense qu’il s’agit d’une pure invention de l’esprit. Je prends le risque de m’attirer les foudres les plus meurtrières. Comment ? vous contestez la notion de peuples ? Pas de peuple arabe, pas de peuple chrétien ? Pas même de peuple juif, alors même que ce dernier se prétend être LE peuple élu ?
    Foutaise ! Il y a seulement des citoyens de nationalités différentes selon la nation dans laquelle ils ont toujours vécu, ou dans laquelle ils se sont intégrés, et, pour la majorité d’entre eux, dans laquelle ils se sont totalement assimilés. Et, parmi ces citoyens - qui forment une nation- certains sont chrétiens, juifs ou musulmans ou d’autres confessions religieuses non monothéistes, et d’autres refusent farouchement toute appartenance à une quelconque religion, j’aimerais bien appartenir à cette dernière catégorie, si cela est possible et acceptable pour ceux qui me connaissent. Et ce n’est pas parce que des citoyens d’une même confession – juive, chrétienne ou musulmane, ou hindouiste, ou que sais-je encore ? – qui vivent dans des pays différents, voire des continents différents, appartiendrait à un même peuple. Qui y a-t-il de commun par exemple entre un juif tunisien, un juif danois, un juif caldoche, un juif soudanais, un juif ukrainien ? Seulement la pratique – et encore faut-il qu’ils soient pratiquants, car la majorité d’entre eux ne le sont plus- de la même religion juive, mais cela ne fait pas, pour autant, un même peuple, car ils sont loin d’être de la même origine, issus du même terreau.  Et ce que je dis des Juifs est naturellement valable pour les chrétiens, les Musulmans, etc. Cette notion de peuple me dérange et m’agace, car historiquement et démographiquement, elle ne tient pas la route, et surtout elle va contre le sens du progrès, de l’harmonie, de la paix, bref, au risque de déplaire, je revendique la notion de nations et non pas de peuples. Et évidemment, par ailleurs, ce qui forme une nation, c’est sa population, et dans ce cas seulement, je peux ajouter son peuple, mais toutes origines et toutes religions confondues. Je refuse d’admettre l’idée que c’est la religion commune d’une population qui justifierait l’existence d’un peuple, qui en serait le ciment, même si cette population est dispersée aux quatre coins de la planète. On n’appartient pas à un même peuple parce qu’on pratique la même religion.

    N'est-ce pas parce que certaines gens ne veulent pas admettre cette notion capitale de nation, et s’entêtent à préférer leur identité religieuse et leur rattachement à un peuple utopique, que, précisément, la notion d’identité se brouille, jusqu’à se dissiper et disparaître ? Ce qui a contraint Nicolas Sarkozy, lorsqu’il était Président de la République à créer un véritable ministère de l’identité nationale. Triste et navrante décision imposée par le désordre de ceux qui vivent en France, mais ne l’aiment pas. Je les plains.

    Enfin, reste la question de la double nationalité ,que d’aucuns revendiquent, parce qu’ils souhaitent ardemment conservé leur nationalité d’origine, continuer d’aller régulièrement se ressourcer dans les eaux qui baignent le pays où ils sont nés,  et se fondre au milieu d’une partie de leurs familles restées au pays, et en même temps vouloir adopter la nationalité du pays qui les a accueillis et où ils sont heureux de vivre : je respecte très fondamentalement ces gens, lucides et sincères, en paix avec eux-mêmes. Ceux-là au moins ne passent pas leur temps à geindre sur leur terre natale perdue.

    Ce qui m’amène tout naturellement à évoquer cette notion de diaspora, vaste question, car renvoyant à la notion de peuple dispersé, consenti ou imposé, cette question me met mal à l’aise. Il me faudra comprendre les raisons de cette mise à distance.  

  • Penser, lire, écrire et créer

    Penser, lire, écrire et créer...
    Ce texte figure à la page 373 de mon nouveau livre, parmi d’autres textes pour « expliquer » les photos choisies, j’ai plaisir à vous l’offrir, il illustre une des photos en couleurs de l’album (pages 347 à 371) où je suis assis devant mon bureau de travail (photo que j’ai déjà utilisée comme nouveau profil sur mon site Facebook.
    « Penser, lire, écrire et créer... » Telle est la devise de l’Institut du cerveau, que je soutiens, et que je fais mienne.
    Lire, suivre des yeux les caractères d’une écriture et pouvoir les identifier, pour prendre connaissance du sens, de la pensée de l’écrivain.
    Écrire, geste banal, en apparence, mais trouver les signes représentant la pensée, au plus près de l’expression, relève d’un besoin physiologique, qui demande la collaboration de tout le corps.
    Créer, c’est avant tout le bonheur du partage.
    Entre l’écrivain et le lecteur, un lien magique, une alchimie.
    Ma mère ne savait ni lire ni écrire, mais sa pensée et son imaginaire étaient d’une richesse infinie. Elle savait traduire par ses mots son univers magique.
    J’essaye par mes livres d’être digne de son héritage.
    Max Memmi 21 XI 2022
    Penser, lire, écrire et créer..

  • Le texte de la postface de mon éditeur à mon nouveau livre Daniel Cohen, l'incandescent

    Pour celles et ceux qui n'ont pas encore lu mon nouveau livre, je ne résiste pas au plaisir de vous livrer, en partage,  le texte de la postface à ce livre de mon éditeur. J'avais sollicité une préface, il a choisi la postface, en renvoyant ainsi,  en fin d'ouvrage ce qu'il avait à dire. J'ai aimé infiniment ce texte , et exprimé toute ma gratitude à son auteur, mon éditeur et ami, pour qui j'ai une grande affection et aussi beaucoup de respect : 

    Postface
    de Daniel Cohen
    Max  Memmi a insisté pour que j’écrive une préface à
    son ouvrage. Pudeur et certaine honnêteté auraient
    dû m’en empêcher, mais il s’agit d’une demande d’un
    homme chaleureux et qui, vis-à-vis de ma personne, n’a
    jamais failli à la foi donnée à ses engagements. J’ai suggéré
    que cela soit plutôt une postface afin de ne pas parasiter son
    travail par une association trop voyante : le sujet et l’éditeur
    de ce volume.
    J’ai toujours eu du mal, non pas à écrire sur moi, l’en-
    semble de mes textes le prouve — mais plutôt à commenter
    les écrits que d’aucuns, touchés, ont dit aimer. Le projet
    de Max Memmi remonte à 2017 , peut-être même à 2016 .
    Il s’explique brièvement, dans son premier chapitre, sur
    l’impasse devant laquelle il s’était retrouvé : comment commencer?
    et dans quel cadre développer l’émotion que mes
    récits avaient suscitée ?
    Je vois, dans mes accomplissements, voire dans la traversée
    des apparences, un constant sillon : celui de l’exil.
    Dans ce cheminement, Memmi dit que l’amour brûle. Cette
    marche s’achève parfois dans la mort de ceux qui ont partagé, même brièvement, cette tension suraiguë, ou encore
    dans la séparation que les fatigues d’une longue union, ou
    d’une plus brève, ont induites. L’écriture s’est imposée
    comme moyen d’accompagnement ou de dépôt de bilan
    dès mon adolescence.
    Mon roman, encore inachevé, D’Humaines conciliations-
    t (n’est paru que le volume I de la tétralogie, intitulé
    Prague de leur fenêtre), mes mémoires ou mes essais, ont tiré
    de l’exercice parfois tragique de ces rencontres, une forme
    de bonheur. Je ne suis pas sûr, la force de l’âge aidant, que
    l’idée du bonheur soit une vérité.
    Max Memmi, que je ne connaissais pas, avant la fin
    de 2015 , est apparu sur le petit écran d’Orizons pour une
    proposition de publication d’un roman, Les femmes de Jean,
    dont la couverture reprend le Portrait de Marie-Thérèse,
    de Picasso, peint en 1937 . Ses trente-sept chapitres sont
    agrémentés d’une citation de trente-six écrivains plus ou
    moins glorieux ; l’une est de notre auteur — j’y vois un trait
    d’humour plus que l’expression d’une fatuité. Les femmes
    de Jean ont emporté ma décision. Depuis lors, j’ai accepté
    de publier neuf  ouvrages, si je ne m’abuse, la plupart des
    romans.
    Je crois lui avoir téléphoné et indiqué que Les femmes
    de Jean ferait partie de notre catalogue. Nous avons offert
    une réception en son honneur et il y a participé.
    Je lui avais demandé, dès notre premier contact, s’il
    était apparenté à Albert Memmi. C’est notre aîné, avait-il
    répondu. J’avais lu, adolescent, vers ma quinzième année,
    peut-être même plus tôt, La Statue de sel, et, peu de temps
    après, Agar, puis Portrait d’un Juif.
    Aussi mesuré-je, au plus juste étalon, l’honneur qu’il
    m’a fait, en associant parfois, dans ses analyses, mon travail
    et celui d’Albert Memmi, écrivain français mondialement
    réputé, peut-être le plus grand auteur juif, de langue française,, qui fût né en Afrique du Nord, au XX e siècle.
    J’eus le plaisir de lui serrer la main à l’automne de
    2017 je crois. Je passai, auprès des deux Memmi, une heure
    éblouissante. Albert, à la veille de son 98e anniversaire, gardait
    son intelligence altière et conservait le beau visage que
    nous voyons dans les photos que telle encyclopédie ou tel
    journal avait publiées en analysant son œuvre. J’aurais aimé
    l’inviter à un repas mais certaine fragilité n’autorisait pas
    une sortie de ce genre. C’est Max qui m’annonça sa mort le
    22 mai 2020, alors que nous étions à peine autorisés à sortir
    de notre premier confinement, lors de la grande crise sanitaire
     de la Covid de 2020-2022.
    Max Memmi est ce qu’on appelait autrefois un « honnête 
    homme » : son œuvre littéraire s’attelle à dresser des
    portraits de femmes ou d’hommes de notre temps, en tout
    cas du demi-siècle que nous venons de traverser. Il importe
    peu de savoir si ses fictions s’inspirent de son expérience
    personnelle — elles ont un parfum d’authenticité ; leur sensibilité
     et leur ironie sous-jacente nous enchantent.
    Je partage avec cet homme les couleurs du terroir natal,
    celui de notre enfance, lui à Tunis, moi au Sahara — il
    a publié, chez Orizons, au début de l’été de 2022, un petit
    essai qui narre, avec je ne sais quel piquant, l’infortune du
    vieillissement.
    Une biographie est un genre difficile. Memmi n’a pas
    cherché à m’interroger en détail sur ce qu’a été le fond
    de ma vie. Il disposait d’un autre matériau et le meilleur
    à mon avis : mes livres. Leur topographie est traversée de
    la réalité du monde : sa description, ses êtres, leur milieu,
    leurs souffrances, leurs joies, leur volonté, leurs plaisirs. Si
    « incandescent » que je paraisse, selon Memmi, expression
    un peu incommode mais que je laisse telle quelle par refus
    de toute censure, je suis un auteur des intérieurs si l’on
    veut bien m’accorder cette expression. « L’idiosyncrasie est
    notre maladie de valeur », écrivait Gide dans le plus beau
    de ses livres, Paludes.
    L’idée d’écrire sur mon travail, sur ma personne, lui
    vint après la lecture du quatuor constituant Eaux dérobées
    paru en 2010 . Puis il enchaîna avec les textes dans l’ordre
    de leur parution, La femme nodale du Libanais Jad Hatem,
    en 2003 , suivi d’autres études éparses du même auteur ; y
    succédèrent l’ensemble de Dires croisés sur Eaux dérobées
    de Daniel Cohen ( 2010 ) ; Une âme juive, méditations au-
    tour d’Eaux dérobées de Daniel Cohen, de Monique Lise
    Cohen ; Daniel Cohen, L’Écriture et la Vie, de Françoise
    Maffre Castellani ; enfin, 80 Gy, Rayonnements de Daniel
    Cohen d’Éric Colombo, ces trois derniers en 2014.
    La trilogie du Trésor familier des rythmes, que j’ai fait
    paraître en 2018 , méditation sur la maladie, productrice
    d’écriture et, partant, analyse sur la littérature comme terrain
    d’observation de soi et des autres, a donné un nouveau
    coup de fouet au travail de notre auteur, quand bien même
    mon sujet paraît trop universel pour sembler inédit.
    Les écrivains, ou la plupart d’entre eux, trouvent leur
    bonheur dans la réinvention perpétuelle du réel tel que la
    communauté des hommes le fixe : vous êtes né à telle date
    et mort à telle autre ; vous avez fait ceci et cela ; vous avez
    réussi ; vous avez perdu. Proust, dès l’instant où je le lus,
    adolescent, a irradié ce qu’il y a de plus sensible en moi ; son
    intelligence du vivant humain et son regard m’ont appris
    non pas à retrouver le monde d’hier mais à comprendre que
    le temps n’est pas celui de l’état civil ni celui de l’Histoire.
    Max Memmi n’est pas que bienveillant ; il n’entend
    pas s’imposer un langage codé qu’excluent ses goûts et sa
    nature. Il a pris pour méthode un excellent exemple : celui
    des morceaux choisis qu’autrefois on privilégiait. Internet
    s’est substitué, parfois cavalièrement, au souhait qu’avaient
    alors les éditeurs de rallier de nouveaux lecteurs. Il espère
    ainsi faire bouger les lignes.
    Il n’est pas sans critiquer l’approche de ma narration
    qu’il trouve, ici et là, trop « intellectualiste ». Il eût aimé
    que mes ouvrages soient plus thématiques et, de la sorte,
    séduisent le grand public. Je reste perplexe. Le gage des
    sensibles, par ailleurs, demeure limité. La gloire n’est pas
    immédiatement due au talent ; elle ne procède pas, quand
    elle concerne le lecteur, d’un coup de cœur ou d’un rejet. En
    édition, comme en tout commerce, mais plus particulière-
    ment dans celui des livres, l’infrastructure de la distribution
    et de la diffusion concourt bien ou mal à l’émergence des
    talents. Ce n’est pas une question strictement contemporaine.
    Nous glissons, depuis une vingtaine d’années, vers
    une entropie : celle d’un système essoufflé par une production 
    gigantesque. La réception d’un auteur devrait sourdre
    et de sa sincérité et de son esthétique. Il est vrai : on écrit
    selon la peau que la vie a tirée et selon l’expérience que nous
    avons de l’autre, notre prochain et notre dieu en somme.
    Il est beau qu’un auteur, comme Max Memmi, drôle,
    alerte et agile, ait passé des années à travailler son projet,
    à le reprendre maintes et maintes fois pour être au plus
    près dudit « incandescent ». Serais-je, par nature, auprès
    des autres, plutôt timide, il semblerait, au dire de notre
    auteur que, dans mes textes, je semble avoir flambé dans la
    chair et dans l’esprit, d’avoir dressé des constructions qui
    auraient dû exiger plans et conseils ; comment démentir ?
    À rebours, je suis d’une patience infinie avec les livres que
    j’écris, n’hésitant pas à y passer des années et des années.
    Pour D’Humaines conciliations (en son premier volet Prague
    de leur fenêtre) et de sa partie critique Paris-Berlin / De la
    déconstruction au XX e siècle. Itinéraires d’un lecteur, repris
    à Un Saharien en son dire allemand, qui devrait sortir des
    presses sous peu, je ne compte, je l’ai dit, ni les années ni
    les bibliothèques avalées.
    Dans le creusement et l’avancée de son travail, Memmi
    me qualifie d’homme « étrange » et je comprends que mon
    côté « fonceur » puisse décontenancer ; mais « l’étrangeté »
    ressortit aux énormes responsabilités dont je me suis tou-
    jours chargé. Je connais mal le gain, je révère l’action. Au
    demeurant, notre auteur, après avoir posé la question, dit
    ceci : « je lui exprimai, sans pudeur, toute mon affection ; je
    l’aimai pour son immense culture et sa modestie, sa beauté
    et son courage ».
    En partant du principe que son travail vise le public
    le plus large, il n’est pas sûr que cette postface, récrite tant
    de fois, serve son objectif. Elle me permet néanmoins de
    remercier son auteur qui, pendant des années, s’est attelé à
    l’ingrat travail de repérer des unités thématiques et faciliter
    une approche plus accessible de mes textes. Il n’est, dans
    la plupart d’entre eux, qu’amour, continûment d’amour,
    même si, alentour, tout relève invariablement de la vie et
    de la mort.
    Max Memmi sait que le principe de l’écriture est un
    tout — dans la vie, on aborde les êtres qui nous entourent
    avec les qualités et les défauts de notre tempérament. Ainsi
    ai-je constitué la trame de mes livres. L’idée d’écrire autre-
    ment ne me sera jamais naturelle. Pour ne pas dire impossible.
    Toute écriture, si elle espère survivre, se doit d’être
    enfermée dans le temps difficile de sa conception ; elle ne
    doit pas en craindre l’âpreté, ni le perpétuel mouvement
    qu’à l’intérieur d’elle-même elle draine.
    S’il est, sur la terre des hommes, une geste, qui ressemblerait à un animal immortel, telle la méduse, ce serait
    l’écriture. Sans elle, nous ne saurions rien de notre espèce,
    de notre effroi, de nos espérances.
    Selon le texte sacré, le combat, entre Dieu (Penouel) et Ja-
    cob, s’est dénoué grâce à l’arrachement du nerf sciatique. Il
    s’en serait suivi que le principe créateur aurait fait affleurer
    l’écriture, un autre tourment, et peut-être, qui sait, un autre
    impératif catégorique.
    Y-a-t-il autre chose qui puisse mieux fixer notre pas-
    sage — face à nous-même et face aux autres ?
    Daniel Cohen, Paris, 20 octobre 2022

  • Mon nouveau livre

    Découvrez mon nouveau livre. Le livre le plus dense, le plus riche, le plus accompli. Le livre sur lequel je me suis investi pendant plus de cinq ans et qui est enfin disponible en librairie. Le livre dont je suis le plus fier. 400 pages réparties dans 13 chapitres et enrichi en plus d'un petit album d'une vingtaine de photos en couleurs.
    Comme d'habitude, vous pouvez le commander à votre libraire habituel, chez mon éditeur Orizons, 25 rue des Écoles, dans le 5e arrondissement de Paris, ou en vous adressant à moi, si vous souhaitez le recevoir avec une dédicace: max-memmi@wanadoo.fr   ou 06 10 56 71 40